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Jean-Louis Caccomo
1963
Auteur Libéral classique
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Jean-Louis Caccomo:Le constructivisme : l'opium des intellectuels
Le constructivisme : l'opium des intellectuels


Anonyme


Texte paru sur son blog le 22 février 2005

Le constructivisme a structuré tout le développement idéologique du XIXe, aboutissant à la naissance des plus effroyables totalitarismes du XXe siècle avec le national-socialisme du III Reich et le communisme soviétique. Les pays d'essence libérale - c'est-à-dire fondés sur une économie libre de marché, une Constitution qui garantit des droits fondamentaux et des institutions qui mettre en œuvre le principe de séparation des pouvoirs - ont été les seules nations à pouvoir nous libérer de ces deux fléaux. Malgré le jugement de l'histoire, le constructivisme continue de produire ses ravages dans la pensée moderne de nos élites. A un moment où l'on « construit » l'Europe, il faut bien mesurer les fondements éthiques et philosophiques de cette « construction » ; car la plupart de nos décideurs forment le vœu de construire un super-État européen pour compenser la « dérive libérale que porte en elle la mondialisation ».

La pensée constructiviste aura fait plus de tort aux sciences sociales et humaines que la religion n'en a fait subir aux sciences naturelles durant des siècles. On doit à l'une la transmission du savoir et la préservation d'un patrimoine intellectuel considérable grâce au patient travail des clercs ; à l'autre, la déformation du savoir, le libéralisme étant présenté comme un système totalitaire qui aliène les individus. Par un savant contraste, l’État est présenté comme l’agent providentiel qui vient libérer ces mêmes individus de la « dictature des marchés ». Tous les journalistes en France, qui osent se proclamer "politiquement incorrects", n'ont pas d'autres grilles de lecture du monde. Et les intellectuels, qui nous disent prendre des risques, nous récitent le même refrain. C'est pourquoi ils sont incapables d'en comprendre son évolution. Mais au lieu de se remettre en cause, d'abandonner les concepts usés, les théories démenties par les faits qui ne leurs permettent pas de comprendre la marche du monde, ils vont déduire que c'est le monde qui est fou !

Le totalitarisme réel est le fait d’États qui se proclament « démocratiques » dans le même temps qu’ils mettent en œuvre les principes collectivistes de la « dictature du prolétariat ». La « dictature du marché » est une figure de style qui confère une popularité médiatique à ceux qui la manipulent avec le talent des propagandistes. Mais une dictature réelle, exercée par un vrai dictateur, est bien autre chose qu’une expression littéraire. Elle vaut la prison et le camp de travail à tous ceux qui osent braver le dictateur en exercice.

Les contestataires de la mondialisation prospèrent dans les pays où règne un État de droit respectueux de leur liberté. Et c'est souvent un État de droit affaibli, qui n'ose plus faire respecter ses propres lois face à la loi de la rue. Les féministes, qui n'ont pas de mots assez durs à propos de « l'exploitation néo-libérale », devraient méditer le sort des femmes dans ces pays qui n'ont pas connu le capitalisme. Les lycéens, qui manifestent à l'approche du baccalauréat, devraient se demander comment vivent les jeunes dans les pays qui n'ont pas la chance d'avoir connu la prospérité économique. Tous ces gens mordent la main qui les nourrit. Il faut veiller à ne pas être entraîné, par faiblesse, par renoncement ou par démagogie, sur une pente qui nous conduirait à la situation critique dans laquelle il y aurait de plus en plus de gens pour mordre alors que se réduirait le nombre de mains qui nourrissent !

Les actions des gouvernements affectent sérieusement les comportements des individus en modifiant leurs systèmes de valeurs et de références. Après trois décennies d'intervention croissante des pouvoirs publics dans l'économie française, il est surprenant d'entendre que la France serait victime d'un traitement de choc ultra-libéral. Le résultat de cette dérive étatiste - ultra-étatiste - est que la majorité des jeunes français rêvent de devenir fonctionnaire, que les forces vives s'expatrient, et que la plupart des entrepreneurs restés en France consacrent une énergie à rechercher des aides publiques (pour récupérer les prélèvements qu'ils subissent) tout en veillant à ne pas trop avoir de clients... Loin d’être nécessairement régulatrice, l’intervention systématique de l’État dans l’économie est à l'origine de son dérèglement et des maux qui en découlent.

Par construction, les théories économiques reposent sur des modèles qui ne peuvent intégrer tous les éléments qui interviennent dans la réalité des phénomènes étudiés. Les modèles scientifiques sont toujours des abstractions de la réalité. Mais, cet argument plaide justement pour une utilisation limitée de la politique économique ; car l’alibi de l’intervention publique est souvent une théorie économique. Il faudrait pourtant appliquer à la politique économique elle-même, et aux réglementations qu'elle suppose, le principe de précaution : si l'on n'est pas en mesure d'évaluer toutes les conséquences d'une politique économique (comme les 35 heures par exemple), alors autant ne pas intervenir.

Tous les ministres rêvent de laisser leur nom dans une loi, mais ils n'ont aucune idée exacte ou approximative des conséquences de leur loi. Pourtant, ces décisions interfèrent sans cesse dans notre vie quotidienne alors qu’elles s’appuient encore sur ces références théoriques auprès desquelles elles recherchent une légitimité scientifique sinon une caution morale. M. Blondel se réclame aujourd’hui de Keynes – tandis qu'il invoquait Marx hier – pour justifier son appel à « la relance par la consommation ». Mais, la théorie keynésienne, même sous sa forme moderne, n’est valide que sous certaines conditions éminemment restrictives (économie fermée, absence de progrès technique, stabilité des comportements de consommation et fixité du taux d’épargne…etc.). Puisque ce monsieur se trompait hier en pronostiquant l'effondrement du capitalisme et la victoire du prolétariat, pourquoi aurait-il raison aujourd'hui ?