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François Bilger:L'école de Fribourg, l'ordolibéralisme et l'économie sociale de marché
François Bilger: L’école de Fribourg, l’ordolibéralisme et l’économie sociale de marché


Anonyme
François Bilger


Paru initialement sur le blog de François Bilger, le 8 avril 2005


Après l’effondrement quasi général des économies planifiées, l’ancienne concurrence entre les systèmes a cédé la place à une sorte de compétition entre les divers sous-systèmes ou variantes possibles de l’économie de marché, de l’économie individualiste de marché américaine jusqu’à l’économie collectiviste de marché chinoise en passant par des formes mixtes telles que l’économie sociale de marché allemande. Cette conception intermédiaire, appelée parfois aussi capitalisme rhénan par opposition au capitalisme anglo-saxon, a influencé fortement depuis 1958 la construction économique européenne. Les partisans du projet de traité constitutionnel actuellement en débat mettent généralement l’accent sur cette filiation, tandis que les adversaires estiment plutôt que ce projet entraîne l’Europe vers l’ultra-libéralisme et donc le modèle américain.

En tout cas, il n’est peut-être pas inutile, dans ce contexte, de rappeler, même succinctement, la genèse de l’économie sociale de marché . A son origine, il y a tout d’abord un groupe d’économistes: l’école de Fribourg, terme générique désignant l’ensemble des adeptes allemands du libéralisme économique, comme on a coutume de désigner les libéraux américains sous le terme générique d’école de Chicago. Ces économistes ont élaboré une doctrine que l’on appelle l’ordolibéralisme et qui est la référence intellectuelle, le modèle pur en quelque sorte, dont l’économie sociale de marché représente en partie l’application pratique, le système économique et social effectivement réalisé en Allemagne.

                                                      L’école de Fribourg

L’adhésion à l’économie de marché n’est apparue en Allemagne qu’au 20è siècle. Alors que la France ou la Grande-Bretagne ont élaboré ce qu’on a appelé le libéralisme économique dès la seconde moitié du 18è siècle et l’ont développé et adopté comme doctrine dominante tout au long du 19è et le début du 20è siècle, les plus grands économistes de ce temps étant tous adeptes de cette conception (Quesnay, Turgot, Smith, Ricardo, Walras, Mill, Marshall…), l’Allemagne s’est ralliée durant toute cette période, comme l’ont fait par la suite, sous des formes variées, pratiquement tous les pays en voie de développement, à une théorie économique historique et à un socialisme national associant dirigisme, protectionnisme et même déjà une certaine dose de collectivisme. C’est paradoxalement au cours de la dépression des années trente qu’est né le libéralisme économique allemand, et ce au moment même où il était abandonné au moins temporairement par la plupart des économistes en Grande-Bretagne, en France et même aux Etats-Unis au profit de l’interventionnisme conjoncturel ou même du dirigisme structurel et quand seule une minorité d’économistes continuaient à penser que la crise ne pouvait être due qu’à un dérèglement de l’économie de marché résultant de l’intervention désordonnée et incohérente depuis la fin de la Première Guerre mondiale d’une administration alors économiquement très incompétente.

En Allemagne, l’idée que, pour combattre la crise, il fallait d’abord rétablir la capacité optimale de fonctionnement du système, était à l’époque partagée par quelques jeunes économistes qui venaient de découvrir avec un vif intérêt la théorie économique classique, fort peu enseignée avant la guerre, et avec elle, la logique du fonctionnement de l’économie de marché. Mais à peine venaient-ils de s’engager dans le débat public en faveur de leurs idées, que l’avènement en 1933 du national-socialisme , prolongement extrême et dictatorial de l’ancien socialisme national, les condamna soit à la discrétion publique soit même à l‘exil. Mais ces contraintes s’avérèrent finalement bénéfiques en leur donnant tout le loisir de préciser leur pensée dans des études approfondies et aussi parce qu’elle les amena à mettre l’accent dans leurs publications sur la valeur instrumentale des libertés économiques et du marché et sur leur capacité à contribuer à l’établissement d’un ordre social valable.

L’appellation d’école de Fribourg provient du fait que les premiers et principaux économistes de cette orientation étaient principalement regroupés dans les années trente à l’Université de Fribourg en Brisgau, dans le sud-ouest de l’Allemagne, qui était d’ailleurs à l’époque l’un des haut lieux de la pensée allemande, avec notamment Husserl et Heidegger en philosophie et Carl Schmitt en droit, sans compter des Prix Nobel scientifiques.

Le principal maître du libéralisme économique allemand et qui n’aimait d’ailleurs pas trop cette qualification historiquement très marquée et souvent connotée négativement, fut Walter Eucken (1891-1950), curieusement très célèbre dans son pays mais fort peu connu ailleurs, sans doute en raison de son décès précoce. C’est lui qui rassembla à l’Université de Fribourg autour de ses recherches l’équipe nombreuse et active d’économistes et aussi de juristes et de sociologues qui constituèrent le noyau de l’école. C’est lui surtout qui écrivit les deux ouvrages qui sont la synthèse de toutes ces premières recherches et qui sont aujourd’hui considérés comme des classiques en Allemagne mais n’ont malheureusement pas été traduits en français: Die Grundlagen der Nationalökonomie (Les fondements de l’économie politique) (1940) et Die Grundsätze der Wirtschaftspolitik (Les principes de la politique économique) (posthume 1952).

Un autre maître important fut Wilhelm Röpke (1899-1966) qui, ayant dû quitter l’Allemagne en 1933, enseigna à l’Université de Genève, ce qui valut sans doute à certains de ses ouvrages d’être traduits en français: La crise de notre temps (1945), Civitas Humana (1946), Explication économique du monde moderne (1946), Au-delà de l’offre et de la demande (1961). Comme les titres de ses ouvrages l’indiquent déjà, cet auteur a une approche plus large, plus sociologique, des problèmes économiques. Alors que l’on peut résumer la pensée de Walter Eucken en disant que tous les désordres sociaux de notre temps ne sont que les symptômes superficiels d’une crise totale de notre économie, Röpke a au contraire affirmé que tous les désordres économiques de notre temps ne sont que les symptômes superficiels d’une crise totale de notre société. Il faudrait encore citer d’autres noms très connus en Allemagne, comme Alexander Rüstow, Franz Böhm, Leonhard Miksch, Alfred Müller-Armack…

L’école comprenait initialement une vingtaine de jeunes professeurs, assistants et chercheurs, rejoints après la guerre par ceux qui s’étaient exilés, principalement en provenance des universités de Genève et d’Istanbul, ainsi que par des économistes d’autres universités allemandes. Cette première génération a aujourd’hui entièrement disparu. Leurs disciples sont actuellement une centaine, généralement spécialisés dans l’enseignement de la politique économique et disséminés dans toutes les universités allemandes ou parfois autrichiennes et suisses, mais dont les recherches théoriques ou pratiques sont toujours principalement publiées dans la revue annuelle du groupe, éditée à Fribourg depuis 1948, intitulée Ordo et dont le nom a dès lors été adopté pour caractériser la version germanique du libéralisme économique. Outre ces universitaires, un grand nombre de hauts fonctionnaires, de journalistes et plus généralement d’anciens étudiants de ces professeurs adhèrent aux idées et participent aux réunions de ce groupe.

                                                     L’ordolibéralisme

L’ordolibéralisme est d’abord, comme son nom l’indique, un libéralisme, prônant la liberté économique, faisant confiance aux initiatives individuelles et aux mécanismes du marché et s’opposant donc à toutes les formes de socialisme et de dirigisme. C’est aussi un libéralisme du 20è siècle, se démarquant volontairement et systématiquement du paléo-libéralisme du 18è et du 19è siècles, c’est à dire du laisser faire et des conséquences économiques, sociales et politiques négatives d’une liberté sans règles ni limites.

En se référant plus précisément et explicitement à la notion d’ordo, empruntée à St. Augustin, c’est à dire à un ordre social idéal fondé sur les valeurs fondamentales de l’homme, les ordolibéraux entendent marquer nettement leur rupture avec la philosophie matérialiste et marxiste comme avec la philosophie utilitariste des anciens libéraux et leur adhésion à la tradition chrétienne ainsi qu’à la philosophie idéaliste allemande, dont le père de Walter Eucken, Prix Nobel, fut l’un des promoteurs au début du 20è siècle Dans cet esprit, ils considèrent qu’il ne s’agit pas seulement de libérer l’économie et d’accroître la richesse et le bien-être individuel et collectif, mais avant tout de créer un ordre économique et social valable. L’économie de marché, écrivait Röpke, est une condition nécessaire mais non suffisante d’une société libre, juste et ordonnée , qui était à ses yeux le véritable objectif. Et Rüstow était encore plus explicite quant à la primauté des valeurs sur les intérêts. Il y a infiniment de choses, affirmait-il, qui sont plus importantes que l’économie: la famille, la commune, l’Etat, le spirituel, l’éthique, l’esthétique, le culturel, bref l’humain. L’économie n’en est que le fondement matériel. Son objectif est de servir ces valeurs supérieures».

                                                Organisation économique et sociale

Dans cette perspective, l’école ordolibérale insiste avant tout sur la nécessité de l’organisation économique et sociale, substituée à la direction par nature plus ou moins arbitraire de l’Etat dirigiste et interventionniste. L’idée centrale est l’établissement d’une Constitution économique et sociale déterminant les libertés mais aussi les règles auxquelles doivent se soumettre les opérateurs privés et publics. Entre la dictature du socialisme et l’anarchie du libéralisme ancien, il s’agit de créer un état de droit économique et social, cohérent avec un régime politique constitutionnel. Un peuple libre est celui qui est gouverné par la loi et non par l’arbitraire public ou privé. Pour les ordolibéraux, comme jadis pour Montesquieu et plus tard Kant, la liberté ne consiste pas à faire tout ce que l’on veut, mais à pouvoir faire ce que l’on doit vouloir .

Par cette insistance sur les notions de Constitution et de loi, l’ordolibéralisme représente, dans le libéralisme contemporain, une variante volontariste et même constructiviste, à l’opposé des variantes ultra-libérales principalement angle-saxonnes. Il faut noter cependant qu’à partir de 1962, date à laquelle Hayek a repris à Fribourg la chaire occupée autrefois par Walter Eucken, la nouvelle génération des ordolibéraux a en partie évolué sous son influence dans un sens moins constructiviste et plus évolutionniste. Mais il reste un esprit globalement plus systématique et plus dogmatique que dans d’autres tendances libérales contemporaines et une certaine confiance dans l’Etat en tant qu’organisateur de l’activité économique, que les expériences de transformation volontaire des systèmes économiques dans les pays de l’Est européen, auxquelles certains ordolibéraux ont participé, ont encore ravivée.

                                                          Principes constituants

Pour construire un régime économique, il convient évidemment de s’appuyer sur la connaissance scientifique de la réalité. Dans son ouvrage théorique majeur fondé sur l‘analyse de tous les systèmes et politiques économiques déjà expérimentés au cours de l‘histoire, Walter Eucken a démontré qu’il n’y a que deux principes fondamentaux d’organisation économique: la subordination des plans individuels à un plan central et la coordination des plans individuels par un mécanisme de prix. L’analyse et l’expérience montrent aussi que ni les systèmes purs s’appuyant sur un seul de ces principes ni les multiples combinaisons de subordination et de coordination déjà réalisées dans le passé, comme tout récemment en Allemagne l’interventionnisme conjoncturel keynésien pratiqué par Schacht dès 1933 ou la planification sectorielle également pratiquée par le national-socialisme, n’ont pu donner pleine satisfaction. Il faut donc inventer une combinaison nouvelle véritablement satisfaisante sur le plan à la fois de l’efficacité économique et de la valeur humaine et cette solution ne peut être, selon Eucken, que le système concurrentiel dans lequel le processus économique est coordonné par le mécanisme concurrentiel des prix tandis que le cadre de ce processus est organisé par l’Etat. Ce système implique d’une part des principes constituants, à inscrire dans la Constitution du pays, et d’autre part des politiques ordonnatrices et régulatrices .

Les principes constituants fixent les règles du jeu de la vie économique et sociale: le principe de la liberté économique et donc l’établissement des libertés d’entreprise, de consommation, de production et d’échange; le principe de la solidarité sociale envers les exclus du système de production ou les catégories les plus démunies de la population; le principe de l’appropriation privée des moyens de production en tant que fondement de l’intérêt personnel pour le développement de la production; le maintien du libre accès au marché et de la libre concurrence, confié à une autorité autonome des monopoles et cartels, et la règle de la liberté réelle et non seulement formelle des contrats; le maintien de la stabilité monétaire, confié à une Banque centrale indépendante, condition d‘un calcul économique rationnel de la part des agents économiques et d‘une répartition non perturbée des revenus; le maintien de l’équilibre budgétaire, contribution de la plus grande entreprise nationale à l’équilibre économique global, et le financement par la dette des seuls investissements; la constance des politiques économiques, condition de la sûreté et stabilité des prévisions des agents économiques; et surtout le principe selon lequel toute mesure de politique économique et sociale doit satisfaire aux critères de conformité à la logique du système économique pour éviter toutes les incohérences de l’intervention publique qui sont généralement à l’origine des dysfonctionnements du système: conformité statique, c’est à dire le fait de pas entraîner de quelque manière la paralysie du mécanisme des prix, boussole indispensable du processus, et conformité dynamique, c’est à dire le fait de ne pas créer ou supprimer des structures ou des comportements nuisibles ou au contraire utiles à la concurrence et au développement de l’économie de marché.

                                                           Politiques ordonnatrices et régulatrices

En application ou en complément de ces principes constituants, des politiques d'organisation et de régulation du système doivent accompagner et faciliter l’évolution économique et sociale. Elles sont de trois types. D’abord une politique structurelle dont le rôle est de créer les conditions optimales d’une croissance potentielle élevée: création des infrastructures, politique de la recherche fondamentale, politique d’apprentissage et de formation professionnelle, politique de soutien des petites et moyennes entreprises pour assurer le renouvellement et l’intensité de la concurrence, politique d’aide à l’adaptation en cas de difficultés sectorielles transitoires mais exclusivement dans le sens indiqué par l’évolution du marché, politique de privatisation, politique de libéralisation internationale progressive mais aussi rapide que possible et enfin, avant tout, politique intense de préservation et promotion de la concurrence pour stimuler en permanence l’initiative et l’innovation au sein de l’économie.

La politique conjoncturelle doit se garder de toute nervosité devant le rythme cyclique, respiration normale de l’économie de marché. Elle doit donc être une politique de stabilité plutôt qu’une politique de stabilisation des fluctuations de l’activité: stabilité monétaire assurée par variation du taux d’intérêt et flottement du taux de change et politique d’équilibre budgétaire avec libre variation des stabilisateurs incorporés. Ce n’est qu’exceptionnellement, en cas de mouvements cumulatifs de dépression ou de surchauffe, qu’une action budgétaire ou réglementaire à court terme peut être envisagée. Enfin une politique sociale ou plutôt sociétale doit utiliser les progrès économiques pour façonner une société plus conforme aux aspirations humaines. C’est d’abord une politique de solidarité sociale, qui doit soutenir et assurer les catégories démunies de la population mais qui, sous peine de compromettre le dynamisme économique et de perdre son caractère redistributif, ne doit pas être générale mais marginale, c’est à dire limitée aux personnes vraiment nécessiteuses, subsidiaire, en fonction des possibilités de la solidarité familiale, et enfin décroissante avec l’élévation générale des revenus. La grande majorité des agents économiques doivent compter, quant à eux, sur leur travail, leur initiative et leur épargne pour améliorer sans cesse leur sort. C’est ensuite une politique de développement de l’épargne et de capitalisme populaire, une politique très active d’éducation et de culture, une politique de décentralisation aussi poussée que possible au profit des régions et des communes afin que les problèmes soient réglés au plus près des personnes concernées, enfin une politique de protection de l’environnement et du cadre de vie que les ordolibéraux ont sans doute été parmi les tout premiers à préconiser dès les années quarante.

                                                         Contrôles

Pour toutes ces interventions économiques et sociales s’applique le principe constituant de conformité au système visant à assurer la cohérence interne et l’efficacité durable, en évitant des effets secondaires pervers ou le déclenchement de spirales d’interventions compensatoires. En particulier, il est important de toujours soigneusement vérifier, en raison de l’interdépendance étroite entre l’ordre économique et l’ordre social, que des mesures économiques n’affectent pas négativement les objectifs sociaux et qu’à l’inverse, des mesures sociales ne faussent pas les mécanismes du marché et n’affaiblissent pas ainsi le dynamisme économique. Si l’ordre social a la primauté sur le système économique au plan des finalités, celui-ci est à son tour prioritaire par rapport à la politique sociale au plan des moyens. La croissance économique assure automatiquement le progrès social en accroissant la richesse moyenne et en améliorant de ce fait la capacité des personnes à assurer leur propre bien-être, leur sécurité et la solidarité avec leurs proches. Elle constitue donc par elle-même la toute première et la meilleure politique sociale.

Il est naturellement tout à fait essentiel que, sauf dans les cas de solidarité sociale, l‘Etat n‘intervienne en aucun cas au bénéfice d‘intérêts particuliers coalisés et ne cède pas aux pressions d’organisations professionnelles ou syndicales généralement fort peu soucieuses de l‘intérêt général. Le meilleur moyen pour y parvenir est de se donner pour règle de privilégier systématiquement l’intervention par la voie de législations de caractère général plutôt que par la voie de mesures administratives ponctuelles. Un autre moyen non négligeable, dans une démocratie parlementaire, est d’opposer à tous les lobbies la force des idées. Ceci amène l’école à préconiser la création d’une sorte de quatrième pouvoir à côté des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire traditionnels, le pouvoir intellectuel sous forme de Conseils scientifiques institutionnalisés auprès de toutes les instances de décision. Ce pouvoir paraît naturellement plus apte que par exemple un Conseil économique et social représentant les organisations économiques et sociales à fournir à l’Etat des analyses et des conseils désintéressés. La tâche de ce pouvoir, à côté de sa fonction d’étude et de conseil, serait justement de révéler et ainsi de neutraliser les pressions d’intérêts particuliers et de contribuer à la formation d’un accord collectif autour des exigences d’intérêt général. Le pouvoir scientifique devrait donc avoir pour rôle d’assurer à la fois la cohérence de l’Etat et le consensus de la société.

                                                     L’économie sociale de marché

Bien qu’ils aient été convaincus de la valeur intellectuelle et opérationnelle de leur doctrine, les partisans de l’ordolibéralisme ne s’attendaient pas, au lendemain de la guerre, à avoir une influence rapide sur la politique économique et sociale de leur pays, parce que l’opinion publique y était encore à l‘époque, comme d’ailleurs dans les puissances occupantes, largement favorable aux idées anti-libérales et même anti-capitalistes. Les premiers programmes élaborés par les nouveaux partis politiques démocratiques traduisaient cet état de choses: christianisme social et même socialisme chrétien dans le premier programme du parti chrétien-démocrate CDU et socialisme marxiste ou démocratique dans celui du parti social-démocrate SPD. Mais, par suite d’une série de hasards, c’est un directeur d’institut économique proche de leurs idées et politiquement indépendant, Ludwig Erhard, qui fut désigné en 1948 comme ministre de l’économie par les autorités d’occupation. Celui-ci les fit entrer en force dans le Conseil scientifique qu’il constitua immédiatement auprès de lui. Certains d’entre eux devinrent députés, d’autres hauts fonctionnaires. Ce fut notamment le cas du Professeur Alfred Müller-Armack, qui fut d’abord nommé directeur de la politique économique au Ministère de l’économie avant de devenir en 1958 secrétaire d’Etat chargé des questions européennes.

A toutes ces fonctions les ordolibéraux purent œuvrer activement à l’élaboration et au développement du nouveau système économique et de la nouvelle politique économique allemande. Ils n’eurent par contre presque aucune influence sur la conception du nouveau système social et de la nouvelle politique sociale de l’Allemagne. Ceci indique clairement la différence fondamentale entre ordolibéralisme et économie sociale de marché. Bien que cette appellation, proposée par Alfred Müller-Armack, pour marquer la synthèse entre liberté économique et solidarité sociale, et ensuite adoptée et popularisée par les responsables politiques, exprimait assez bien la conception ordolibérale, le système économique et social allemand n’a jamais été et n’est toujours pas l’application parfaite de cette doctrine. Il a en effet été conçu dès le départ par les autorités politiques comme un système hybride, comportant d’une part une composante économique relevant, quant à elle, essentiellement de la doctrine ordolibérale et d’autre part une composante sociale relevant principalement d’autres inspirations. C’est en outre un système évolutif en perpétuelle transformation, une transformation qui l’a tantôt éloigné tantôt rapproché de l’ordolibéralisme, en fonction à la fois de l’évolution des problèmes économiques et sociaux, des grandes mutations idéologiques et surtout des alternances politiques intervenues depuis 1948. Il est donc indiqué d’en faire une présentation historique plutôt qu’une synthèse prématurée, en distinguant les quatre périodes politiques majeures qui ont marqué l’évolution du système.

                                                        La fondation

La première période, que l’on peut qualifier de fondatrice, se situe entre 1948 et 1966, avec une majorité chrétienne-démocrate. Elle est marquée par la forte personnalité de Ludwig Erhard, d’abord comme ministre de l’économie sous le chancelier Adenauer, puis comme chancelier lui-même.

Après la réforme monétaire voulue par les Alliés, Erhard impose immédiatement, contre l’avis des Alliés mais sur proposition de son Conseil scientifique, une large libéralisation des prix et le rétablissement quasi général du mécanisme des prix pour la direction de l’activité économique. Après quelques mois de difficultés intenses et de contestations politiques virulentes, l’économie se redresse spectaculairement et produit ensuite pendant plus d’une décennie des résultats économiques et sociaux spectaculaires, qui valent à Erhard d’être appelé le père du miracle économique allemand . En 1949, la nouvelle Loi fondamentale allemande ratifie cette orientation en constitutionalisant les principales libertés économiques et un certain nombre de principes sociaux. Saisie par la suite par l’opposition, la Cour constitutionnelle a considéré, dans une décision célèbre en Allemagne, que la Loi fondamentale n’imposait pas une interprétation strictement ordolibérale, mais excluait toute forme d’économie qui ne soit pas une économie de marché et une société de solidarité. Comment ne pas songer aux débats actuels autour du projet de traité constitutionnel européen?

En quelques années, les principales institutions ou politiques souhaitées par les ordolibéraux sont mises en place: Banque centrale indépendante, Office des cartels avec cependant une loi édulcorée sous la pression du patronat sur les pratiques anti-concurrentielles, libération rapide et parfois unilatérale des échanges extérieurs, privatisation progressive des grandes entreprises publiques, institution du Conseil d’experts universitaires. A l’exception des secteurs de l’agriculture, des mines et de la construction toujours dirigés, les principales politiques structurelles et sociétales (formation professionnelle, soutien des Pme, promotion de l’épargne salariale et du capitalisme populaire, allocation sociale de base relevant des communes, décentralisation, etc.) sont conformes aux souhaits ordolibéraux. C’est surtout la politique conjoncturelle qui leur donne pleine satisfaction, avec une stabilité monétaire quasi parfaite et un budget généralement excédentaire.

En revanche, le système et la politique sociale relèvent plutôt de traditions anciennes ou d’une inspiration chrétienne-sociale. En consacrant dans la Constitution la liberté de coalition, principe profondément anti-libéral, l’Allemagne a établi comme ailleurs le pouvoir des organisations patronales et syndicales et la dénaturation du marché du travail par les négociations collectives. Durant la période de reconstruction et d’afflux de millions de réfugiés, les partenaires sociaux ont utilisé leur pouvoir monopolistique de manière modérée, mais dès la fin de cette période, des revendications sociales croissantes, au-delà des progrès de productivité, ont engendré des tensions inflationnistes de plus en plus difficiles à maîtriser sans freinage délibéré de l’activité. D’autre part, le rétablissement de la sécurité sociale traditionnelle, obligatoire et paritaire ainsi que l’institution de la cogestion paritaire dans les industries du charbon et de l’acier et de la cogestion non paritaire dans les autres secteurs, la limitation du droit de licenciement, l’institution d’une retraite dynamique, etc. ont également écarté fortement le système social allemand de la doctrine ordolibérale. Si celle-ci a indiscutablement un fondement philosophique chrétien, sa conception de l’organisation sociale diffère très sensiblement de celle du christianisme social.

L’économie sociale de marché est un compromis entre deux logiques distinctes et, comme tout compromis de cette sorte, il arrive fatalement un moment où le manque de cohérence se révèle dans un dysfonctionnement majeur. La première récession de l’Allemagne d’après-guerre met le système à l’épreuve en 1966. Celle-ci, fort bénigne en réalité selon les critères actuels, est très mal perçue par un pays habitué aux performances exceptionnelles du miracle économique allemand . En dépit de sa grande popularité, le refus tout à fait cohérent d’Erhard de traiter cette défaillance d’un système hybride par une politique de relance de la demande globale sera l’une des causes de sa chute et, peu après, de la première alternance politique.

                                                       La dérive

La seconde phase de l’économie sociale de marché, qui s’étend de 1966 à 1982, correspond donc à la prise de pouvoir par le parti social-démocrate et sera marquée, dans le domaine économique et social, par l’influence de deux hommes: Karl Schiller, ministre de l’économie sous le chancelier Willy Brandt, et Helmut Schmidt, ministre des finances puis chancelier. C’est une période qui va accentuer la dérive du système par rapport à la doctrine ordolibérale. Si le SPD a bien répudié son vieux programme marxiste de 1925 et adhéré officiellement à l’économie sociale de marché lors de son fameux congrès de Bad Godesberg en 1959, il entend en modifier assez sensiblement certains aspects.

Sur le plan du système économique, les sociaux-démocrates vont d’abord faire voter quelques lois visant à renforcer la politique de concurrence, que les ordolibéraux avaient souhaitées et que les chrétiens-démocrates n’avaient pu ou voulu imposer: contrôle des fusions, sanction accrue des positions dominantes, interdiction des ententes, etc. Ils décident aussi, en 1971, la flexibilité du taux de change, comme le souhaitaient les ordolibéraux, mais l’abandonnent à nouveau, en 1979, avec la création du Système monétaire européen, il est vrai, sous domination du deutschmark. Mais le changement le plus important concerne la politique de stabilité conjoncturelle dans un sens tout à fait anti-libéral, avec le vote en 1967 d’une grande loi de promotion de la stabilité et de la croissance , qui introduit en Allemagne la conception keynésienne de l’orientation globale par la programmation à moyen terme et la modulation discrétionnaire à court terme des budgets publics ainsi que la conception post-keynésienne de la concertation globale entre pouvoirs publics et partenaires sociaux. La politique d’intervention structurelle est également très accentuée, surtout après la survenance de la crise économique mondiale en 1975.

Enfin, sur le plan social, la croissance des indemnités de chômage et le renforcement des freins aux licenciements rigidifient le marché du travail, tandis que l’extension de la cogestion paritaire à toutes les entreprises et coopératives de plus de 2000 salariés, la généralisation de la sécurité sociale et surtout l’expansion massive et continue des dépenses publiques et des transferts sociaux, notamment dans les domaines de l’éducation et de la santé, traduisent l’irruption de la conception welfariste social-démocrate dans la structure du système. Cet Etat-providence, une politique sociale tendant à socialiser dans une large mesure la satisfaction des besoins sociaux et l’extension des transferts sociaux à des personnes parfaitement capables d’assurer tous ces besoins par leurs propres moyens est évidemment profondément contraire aux principes de l’ordolibéralisme

Les sociaux-démocrates allemands étaient alors profondément convaincus que ces réformes permettraient d’établir une économie sociale de marché moderne et pleine d’avenir. J’estime, écrivait le Professeur Schiller, que cette synthèse de la conception ordolibérale de l’économie de marché pour régler les relations microéconomiques d’une part, et de la politique keynésienne pour l’orientation des grandeurs macroéconomiques d’autre part, liée à une "welfare policy" moderne est la seule et unique réponse convaincante aux changements économiques et sociaux de notre temps .

En fait, cette synthèse s’avéra bientôt inefficiente et même perverse. La politique macroéconomique et la concertation sociale ne permirent nullement d’éviter la surchauffe et l’inflation croissante du début des années 70 ni la dépression et le chômage croissant consécutifs aux chocs pétroliers de 1975 et 1979. L’action concertée tomba en désuétude dès le milieu des années 70 et la politique macroéconomique ainsi que le relâchement de la discipline budgétaire aboutirent, au début des années 80, à un déficit budgétaire et à une dette publique élevés. Enfin, l’énorme extension de l’Etat-providence, faisant passer la part des prélèvements publics d’un tiers en 1966 à près de la moitié du PIB en 1982, démontra ses effets pervers: freinage de l’initiative et de l’efficacité économiques par le poids des charges et limitation de la solidarité sociale par la généralisation même de la redistibution des revenus. Un changement d’orientation paraît dès lors indispensable. Il entraîne une nouvelle alternance politique.

                                                      La restauration

Une troisième phase de l’économie sociale de marché débute donc en 1982 et s’étend jusqu’en 1998. Elle est placée par la CDU et le chancelier Helmut Kohl sous le signe du virage et donc du retour aux principes de la période fondatrice et de Ludwig Erhard en vue de renouer avec les succès économiques et sociaux de ce qui avait été appelé le miracle allemand . Les événements politiques et sans doute aussi les résistances sociales empêcheront la pleine réalisation de ce projet.

Le changement par rapport à la période social-démocrate sera très net sur le plan macroéconomique, avec l’abandon immédiat et total de la conception keynésienne de la politique conjoncturelle discrétionnaire à court terme et le retour à la politique classique de stabilité monétaire et à l’effort de rétablissement de l’équilibre budgétaire ainsi qu’à une politique fiscale visant à réduire la part des prélèvements publics dans le PIB. Les résultats économiques sont excellents jusqu’au début des années 90. Mais la nouvelle orientation budgétaire se trouvera fortement handicapée à partir de 1989-90 par les lourdes charges de la réunification. Il y aura aussi quelques tentatives de retour à la concertation macroéconomique, contraire aux principes ordolibéraux, sous forme d’alliance pour l’emploi entre l’Etat et les partenaires sociaux, mais sans résultats tangibles. Les difficultés plus importantes que prévu du redressement économique de l’ex-RDA maintiendront aussi un interventionnisme structurel et une multitude de subventions contraires à tous les principes ordolibéraux.

Sur le plan social, le changement est encore moins net. Quelques réformes ont tenté d’inverser l’évolution des charges sociales, telles que la réduction de certaines indemnités de chômage, l’élévation de l’âge de la retraite ou le contrôle médicalisé des dépenses de santé, mais d’autres nouvellement introduites, comme l’allocation-dépendance, les ont par contre augmentées. On peut noter aussi une incitation accrue à l’épargne salariale et une relance du capitalisme populaire ainsi que quelques mesures de flexibilisation du marché du travail. Mais aucune réforme sociale radicale dans le sens libéral n‘a eu lieu, la nécessité du consensus social ou fédéral s’avérant souvent un facteur de freinage de l’innovation. Le mécontentement suscité par le poids très lourd des transferts économiques et sociaux effectués au bénéfice des Länder de l’Est (environ 4% du PIB annuellement) et la hausse inexorable du chômage finissent par entraîner une nouvelle alternance politique.

                                                     La réforme

Cette dernière phase de l’économie sociale de marché a vu le retour au pouvoir du parti social-démocrate allié aux Verts sous l’autorité du chancelier Gerhard Schröder de 1998 à nos jours.

La nouveauté importante de cette période est l’établissement à partir du 1 janvier 1999 de l’union économique et monétaire européenne et donc de l’européanisation de la politique économique allemande comme de celle des autres pays membres de la zone euro. Dorénavant, c’est la Banque centrale européenne qui détermine la politique monétaire et c’est le Pacte de stabilité et de croissance qui encadre la politique budgétaire du pays. L’Allemagne n’a donc plus la possibilité de modifier, comme ce fut le cas dans le passé, son orientation macroéconomique, à moins bien entendu d’obtenir l’accord de ses partenaires européens. C’est précisément ce qui s’est produit lors du Sommet européen de mars 2005 où la France et l’Allemagne ont obtenu un certain assouplissement du Pacte de stabilité qui avait pourtant été établi, et c’est un des paradoxes de l’évolution européenne récente, précisément à la demande de l’Allemagne sous la précédente majorité. Sous réserve de cette entorse, essentiellement due à la charge budgétaire persistante de la réunification, le gouvernement allemand actuel n’a jamais manifesté, en dépit de la faiblesse constante de la croissance et du chômage massif, le désir de modifier sensiblement la composante économique de l’économie sociale de marché, à laquelle les sociaux-démocrates allemands semblent à présent durablement ralliés.

Un autre paradoxe de l’évolution récente est que ce gouvernement social-démocrate s’est engagé dans un processus actif de réforme du système social, qu’il va jusqu’à remettre en question l’Etat-providence et qu’il affirme à présent de nouveaux principes qui se rapprochent beaucoup des règles ordolibérales en matière sociale: priorité de la production par rapport à la redistribution et surtout responsabilité et initiative individuelles au lieu de protection collective et assistance publique. Dans cette perspective, des réformes du marché du travail introduisent davantage de flexibilité en réduisant la protection légale contre les licenciements, en imposant aux chômeurs de longue durée la justification d’un refus d’emploi et en diminuant les prestations en cas de refus non justifié, en créant des mini-jobs et autres formules détaxées, en transformant les agences pour l’emploi en agences de placement, etc. Une réforme du système de santé augmente la ponction sur les assurés et diminue le nombre de prestations remboursées. Une réforme des retraites élimine la plupart des cas de pré-retraite avant l’âge légal de 65 ans, atténue sensiblement la retraite dynamique en établissant une relation entre le nombre des retraités et celui des cotisants en baisse régulière du fait de l’évolution démographique et développe l‘incitation à accroître la retraite par capitalisation. Le résultat d’ensemble recherché est évidemment d’un côté d’abaisser le coût du travail en vue de réduire le chômage et d’un autre côté d’inciter l’ensemble des salariés à exercer davantage leur initiative pour garder ou retrouver un travail et pour s’assurer par l’épargne une protection de vie convenable. Il y a incontestablement une rupture avec les anciennes idées et les pratiques sociales antérieures.

Une autre évolution importante des idées concerne la conception de la justice sociale. C’est ainsi que le chancelier Schröder a déclaré que l’égalité ne pouvait plus être un objectif de l’Etat, qu’une politique juste devait accepter l’inégalité et qu’il ne fallait par conséquent plus parler de justice sociale mais simplement de justice. L’objectif de l’Etat n’impliquerait donc plus l’égalisation des conditions sociales indépendamment des performances individuelles, mais l’égalité des chances et la reconnaissance des performances individuelles. Pour obtenir cette égalité des chances, il conviendrait essentiellement aujourd’hui d’offrir à tous l’égalité d’accès à l’éducation et à la culture, ce qui est d’ailleurs aussi, dans l’économie contemporaine de la connaissance et de l’information, la principale clé du développement économique et le moyen préventif d’éviter toute exclusion sociale. D’où une politique beaucoup plus active de l’éducation. Relevant ce défi, divers Länder dirigés par les chrétiens-démocrates se sont engagés récemment dans une politique de financement accru mais de plus en plus privé de leurs universités, que le gouvernement a cependant voulu empêcher mais que la Cour Constitutionnelle vient de déclarer conforme aux principes constitutionnels.

Enfin, il convient de relever, indépendamment de l’action du gouvernement actuel, l’évolution sensible des relations sociales sous l’influence de la compétition mondiale, de la désindustrialisation ou de la crainte de délocalisations. Si le gouvernement a décidé une certaine extension légale de la cogestion et a souhaité développer la concertation des partenaires sociaux, en pratique on assiste à une sensible régression de ces formes traditionnelles de relations sociales en Allemagne. Faute de demande de la part des salariés concernés, la cogestion tombe en désuétude dans beaucoup d’entreprises et nombre d’entre elles substituent des accords d’entreprise ou même des contrats individuels de travail aux conventions collectives. Le taux de syndicalisation est d’ailleurs en forte baisse, alors qu’on aurait pu s’attendre à une évolution inverse en période de crise économique et sociale, et il en est de même en ce qui concerne l’adhésion aux organisations patronales, ce qui est déjà plus compréhensible. Ces partenaires sociaux sont même souvent considérés par l’opinion publique comme coresponsables de la crise et comme des obstacles à la flexibilité des salaires et de la durée du travail nécessaire à la sauvegarde des emplois, souci principal des salariés. Cette évolution n’est-elle liée qu’à la peur du chômage ou risque-t-elle d’être durable parce qu‘elle résulterait d‘une croissante individualisation de la société allemande? L’avenir le dira.

Au terme actuel de son évolution depuis plus d’un demi-siècle, on peut constater pour finir que l’économie sociale de marché allemande demeure toujours un système hybride, combinant un certain libéralisme économique et un certain modèle social dont on peut se demander s’ils sont complémentaires ou au contraire à la longue incompatibles. Mais il y a indiscutablement en ce moment, sous l’influence d’une crise économique et sociale persistante et de l’évolution concomitante des idées, une remise en question profonde de la composante sociale du système dans un sens qui tend à rapprocher celle-ci, comme auparavant la composante économique, de sa conception théorique dans l’ordolibéralisme. Il sera intéressant et instructif d’observer l’effet de ces réformes sur l’évolution économique et sociale allemande.


Pour plus de détails sur la conception doctrinale et la période initiale de l’économie sociale de marché en Allemagne, on peut consulter l'ouvrage de François Bilger: La pensée économique libérale dans l’Allemagne contemporaine , publié en 1964 et malheureusement épuisé depuis longtemps, mais consultable dans les principales bibliothèques.