I. Introduction
Un phénomène a depuis longtemps, et à un degré particulier, attiré lattention des chercheurs en économie et en sciences sociales : le fait que certaines marchandises (les pièces en or ou en argent des civilisations avancées, ainsi que les représentations matérielles de ces pièces) deviennent des moyens déchange acceptés universellement.
Il est évident, y compris pour un profane, quune marchandise ne devrait être abandonée par son propriétaire que contre une autre plus utile pour lui.
Or le fait que chaque unité économique dune nation donnée soit prête à échanger ses biens pour des petits disques de métal apparemment moins utiles, ou pour des représentations de ces disques, est un procédé tellement opposé au cours ordinaire des choses, que nous pouvons bien nous demander si même un penseur de renom comme Savigny na pas considéré cette situation comme absolument " mystérieuse ".
Il ne doit pas être supposé que la pièce, ou sa représentation, employés en monnaie courante, constitue une énigme.
Nous devons nous éloigner de ces formes contemporaines et retourner aux premiers stades du développement économique, ou visiter certains pays actuels dans lesquels nous trouvons le métal précieux dans un état pré-monétaire mais servant malgré tout de moyen déchange, au même titre que dautres marchandises : peaux, thé, blocs de sel, porcelaine, etc.
Aussi loin serons-nous confrontés à ce phénomène, devrons-nous expliquer pourquoi lHomo Economicus est prêt à accepter un certain type de marchandise (même sil nen a pas besoin, ou si son besoin est déjà assouvi), en échange de tous les biens quil dirige vers le marché, alors que ces marchandises ne sont pas le moins du monde ce dont il a besoin, au regard des biens quil est résolu à acquérir dans la transaction.
En conséquence, ce phénomène social qui sétend jusqu'à nos jours soulève une chaîne ininterrompue de dissertations sur la nature et la spécificité de la monnaie, dans ses relations avec tous ces échanges constitués.
Des philosophes, des juristes, des historiens, au même titre que des économistes, et même des naturalistes et des mathématiciens, ont étudié ce problème notable, et il nest pas de peuple civilisé à avoir fourni sa part à labondante littérature consacrée à ce sujet.
Quelle est la nature de ces petits disques ou de leurs représentations, qui en eux-mêmes semblent navoir aucun but utile, mais qui néanmoins, en contradiction avec le reste de lexpérience, passent dune main à lautre en échange des marchandises les plus utiles, et pour qui chacun se montre passionné ?
La monnaie est-elle un membre organique du monde des marchandises, ou est-ce une anomalie économique ? Devons-nous nous référer à la pratique commerciale pour déterminer sa valeur, comme pour tout autre bien, ou la monnaie est-elle un produit abstrait issu des conventions et de lautorité ?
II Quelles ont été jusquici les tentatives de solution proposées ?
Les résultats des investigations menées sur ce problème sont proportionnées soit au développement de la recherche historique générale, soit au temps et aux efforts intellectuels passés pour trouver une solution.
Le phénomène énigmatique de la monnaie est pour ainsi dire resté sans explication convaincante ; il ny a même pas daccord sur la question fondamentale de sa nature et de ses fonctions. Nous navons pas encore de théorie satisfaisante de la monnaie.
Lidée qui venait en premier pour expliquer la fonction spécifique de la monnaie en tant que moyen déchange universel, consistait à faire référence à une convention générale, ou à une origine législative.
Le problème que la science a dès lors eu à résoudre, cest de fournir une explication dune pratique générale et homogène, qui est, incontestablement en faveur du bien commun, mais qui semble pourtant en conflit avec les plus proches et les plus immédiats intérêts des individus contractants.
Dans de telles circonstances, lexplication la plus logique semble être la procédure décrite ci-dessus, qui est extérieure à la sphère des considérations individuelles.
Supposer que certains biens, les métaux précieux en particulier, furent élevés au rang de moyens déchange par une loi ou une convention générale, et ce pour le bien de tous, permettait de résoudre cette difficulté, et de la façon apparemment la plus simple et la plus naturelle possible, dans la mesure où la forme même de la pièce de monnaie semblait être une marque de la régulation étatique. Telle était lopinion de Platon, dAristote, des juristes romains, et ces auteurs furent suivis par les écrivains médiévaux.
Même les développements les plus modernes de la théorie de la monnaie nont pas, en substance, dépassé ce point de vue (1).
Testée plus précisément, la supposition sous-jacente de cette théorie prête le flanc à de nombreux doutes. Un événement dune signification aussi universelle et dune notoriété si inévitable létablissement dun moyen universel déchange par la loi ou une convention , pourrait certainement être gravé dans la mémoire de lhomme, attendu que cette situation serait accomplie dans un grand nombre de lieux.
Pourtant aucun monument historique ne nous apporte dinformations dignes de foi de transactions soit conférant une identification claire dun moyen déchange toujours dusage, soit touchant à leur adoption par des peupes récents, ce qui ne témoigne pas en faveur dune initiation des premiers âges de la civilisation économique à lusage de la monnaie.
Et en fait la majorité des théoriciens ne sarrêtent pas à lexplication de la monnaie fournie ci-dessus. Ladaptabilité particulière des métaux précieux à la monnaie et aux pièces fut relevée par Aristote, Xénophon, et Pliny, et dans une plus large mesure par John Law, Adam Smith et ses disciples, qui ont tous cherché une explication plus approfondie du moyen déchange que constitue la monnaie.
Il est néanmoins clair que le choix des métaux précieux selon la loi ou une convention, même créés en conséquence de leur adaptabilité particulière aux buts monétaires, présuppose la connaissance pratique de lorigine de la monnaie, et de la sélection de ces métaux or cette présupposition est anhistorique.
Et aucun théoricien confronté à ce problème cest-à-dire comment expliquer que certaines marchandises (les métaux précieux à certains stades dévolution culturelle) ont été encouragées parmi la masse de toutes les marchandises , et acceptées comme moyen déchange reconnu na pu jusqu'à présent le résoudre. Cette question concerne non seulement lorigine mais aussi la nature de la monnaie et sa position face aux autres marchandises.
III. Le problème de la genèse du moyen déchange
Dans léconomie primitive lhomme est graduellement éveillé à une compréhension des avantages économiques qui peuvent être obtenus par lexploitation des opportunités déchange existantes. Ses buts primordiaux, conformes à la simplicité de la culture primitive, sont exclusivement dirigés vers tout ce qui lui tombe directement sous la main.
Et la valeur de lusage des marchandises quil cherche à acquérir est le seul élément qui entre en compte dans ce marchandage.
Dans de telles conditions chaque homme a lintention dacquérir dans léchange les seuls biens dont il a directement besoin, et rejette ceux pour lesquels il na aucun besoin, ou dont il est déjà suffisamment approvisionné. Ainsi il est clair que, dans de telles circonstances, le nombre de marchandages effectivement échangées doit atteindre ses dernières limites. Rarement le cas se présentera où une marchandise détenue par quelquun aura une valeur dusage moindre quune autre marchandise détenue par quelquun dautre ! Et pour ce dernier seul le cas inverse se présentera. Mais bien plus rare sera le cas où ces deux personnes physiques se rencontreront ! Pensez, en effet, aux difficultés particulières gênant léchange immédiat de biens, lorsque loffre et la demande ne coincident pas ; lorsque, par exemple, une marchandise indivisible doit être échangée contre une variété de biens en possession de différentes personnes, ou lorsque ces marchandises sont demandées épisodiquement et ne peuvent être fournies que par des personnes différentes !
Même dans le cas le plus fréquent et le plus simple, où une unité économique, A, demande une marchandise possédée par B, et B en désire une possédée par C, tandis que C veut une marchandise de A -- même ici, dans un échange pur, léchange des biens en question pourrait ne pas être réalisé.
Ces difficultés prouveraient lexistence dobstacles insurmontables à la progession du trafic, et à la production de biens à la vente irrégulière, mais elles nont pas constitué une explication véritable des différents degrés de capacité déchange (Absatzfahigkeit) des marchandises. La différence existant entre les articles de commerce est dun intérêt majeur pour la théorie de la monnaie, et pour le marché en général. Léchec de la tentative dexplication du phénomène du commerce consitue non seulement une brèche lamentable dans notre science, mais aussi une des causes essentielles de larriération de la théorie de la monnaie. La théorie de la monnaie suppose nécessairement une théorie de la capacité déchange des biens.
Si nous comprenons ceci, nous serons capables de comprendre comment la capacité presquillimitée déchange de la monnaie est seulement un cas particulier -- présentant une simple différence de degré dun phénomène général de la vie économique cest-à-dire, la différence dans la capacité déchange des marchandises en général.
IV. Les marchandises plus ou moins échangeable
Il est une erreur fort répandue en économie, et qui consiste en croire que toutes les marchandises, à un moment donné et sur un marché donné, doivent se comporter entre elles selon une relation déchange définie ; en dautres termes, quelles peuvent être mutuellement échangées dans des quantités définies. Il nest pas vrai que, sur un marché donné, 10 livres dun article = 2 livres dun autre = 3 livres dun troisième, et ainsi de suite. La plus rapide observation des phénomènes de marché nous apprend quil nest pas en notre pouvoir, lorsque nous achetons un article à un certain prix, de le revendre aussitôt au même prix. Si nous essayons de nous débarrasser dun vêtement, dun livre, ou dune uvre dart, que nous venons juste dacheter, sur le même marché, même aussitôt, même avant que la conjoncture nait changé, nous nous convaincrons facilement du caractère chimérique dune telle affirmation. Le prix auquel chacun peut comme bon lui semble acheter une marchandise sur un marché donné à un moment donné, et le prix auquel on peut disposer et se séparer de la même chose à volonté, sont deux choses différentes.
Une telle observation sapplique tant au commerce de gros quaux prix de détail.
On ne peut même pas disposer des biens aussi commercialisables que le blé, le coton, le fer, pour le prix auquel on les a achetés.
Le commerce et la spéculation seraient les choses les plus simples du monde, si la théorie de léquivalence objective des biens était correcte, sil était effectivement vrai que sur tel marché et à tel moment des marchandises pouvaient être mutuellement converties à volonté en des relations quantifiées définies si elles pouvaient, en dautres termes, être aussi aisément vendues quachetées à un prix donné.
Il ny a jamais une telle situation de capacité déchange des biens.
La vérité est que, même dans le marché le mieux organisé, tandis que nous sommes capables dacheter ce que nous voulons et quand nous le voulons, et au prix que nous désirons (le prix dachat), nous ne pouvons nous en séparer que de manière désorientée, au prix de vente. (2)
La perte enregistrée par celui qui est obligé de céder un article à un moment donné, au regard des prix dachat courants, est très variable, comme le montrent les marchés de marchandises spécifiques.
Si le blé ou le coton sont échangés sur un marché spécialisé, le vendeur est en position de vendre pratiquement nimporte quelle quantité, lorsque il le souhaite, au prix courant, ou du moins avec une perte de quelques centimes seulement sur le montant total. Si lagent souhaite vendre, en dimportantes quantités, des vêtements ou des étoffes de soie à volonté, il devra régulièrement se contenter dune diminution considérable du prix de vente.
Pire est le cas de celui qui, à un certain moment, se débarrasse dinstruments astronomiques, de préparations anatomiques, décritures sanskrites ou dautres articles si peu marchandables !
Si nous appellons tout article ou bien plus ou moins vendable, au regard de la plus ou moins grande facilité avec laquelle ils peuvent être échangés sur un marché, à nimporte quel moment et au prix courant, ou avec de négligeables variations, nous pouvons voir de ce qui a été dit, quil existe une différence évidente entre les marchandises.
Néanmoins, et en dépit de sa grande signification pratique, on ne peut pas dire que ce phénomène a été convenablement pris en considération par la science économique. La raison en est, pour une part, la circonstance que la recherche liée aux phénomènes de prix a été orientée presque exclusivement en direction de la quantité de marchandises échangées, et pas aussi bien vers la plus ou moins grande facilité avec laquelle des articles pouvait être échangées à des prix normaux. Pour une autre part, la raison en est aussi la méthode complètement abstraite par laquelle la capacité déchange des biens a été traitée, sans considération pour les circonstances concrètes.
La personne qui soriente vers le marché avec ses articles a pour règle den disposer, certainement pas à nimporte quel prix, mais à un prix tel quil corresponde à la situation économique générale. Si nous nous interrogeons sur les différents degrés de capacité déchange de biens et sur leurs implications dans la vie pratique, nous pouvons seulement le faire en considérant la plus ou moins grande facilité avec laquelle ils peuvent être échangés à des prix correspondants à la situation économique générale, cest-à-dire, aux prix économiques (3). Une marchandise est plus ou moins vendable au regard de la manière dont nous sommes capables, avec plus ou moins de succès prévisible, de nous en débarrasser à des prix correspondant à la situation économique générale, aux prix économiques.
Qui plus est, le laps de temps pendant lequel on estime que la marchandise acquise au prix économique sera mise au rebut, a une grande signification pour la recherche de son degré de capacité déchange.
Le fait que la demande dune marchandise soit mince na pas dimportance, de même que le fait quen dautres lieux sa capacité déchange soit faible ; si son propriétaire peut attendre son heure, il sera au final capable de sen séparer aux prix économiques. Cependant, depuis que cette condition est souvent absente du cours actuel des affaires, il se produit pour les objectifs concrets une différence importante entre les marchandises, dune part, pour lesquelles nous espérons nous en séparer à nimporte quel moment au prix économique (ou au moins à peu près), et de tels biens, dautre part, pour lesquels nous navons pas un tel espoir, et pour lesquels, si le propriétaire veut sen séparer au prix économique, il devra nécessairement attendre un certain temps, ou sera contraint de procéder à une réduction plus ou moins sensible de son prix de vente.
De plus, nous devons nous pencher sur le facteur quantitatif de la capacité déchange des marchandises. Certains biens, en conséquence du développement des marchés et de la spéculation, sont capables à chaque instant de se vendre à pratiquement nimporte quelle quantité, pour un certain prix économique. Dautres biens ne pourront se vendre au prix économique que dans des quantités plus faibles, proportionnées à la croissance graduelle de la demande efficiente, provoquant une baisse relative du prix en cas doffre plus élevée.
V. Des causes des différents degrés de capacité déchange des marchandises
Le degré par lequel une marchandise peut être vendue, sur un marché donné, à nimporte quel moment, à un prix correspondant à la situation économique (le prix économique), dépend des circonstances suivantes :
1. Le nombre de personnes qui veulent encore la marchandise en question, ainsi que létendue et lintensité de ce désir, lequel nest pas satisfait, ou se renouvelle constamment.
2. Le pouvoir dachat de ces personnes.
3. La quantité disponible de la marchandise, au regard du désir total non satisfait de celle-ci.
4. La divisibilité de la marchandise, et tout autre moyen par lequel elle peut être ajustée aux besoins des consommateurs individuels.
5. Le développement du marché, et de la spéculation en particulier. Et enfin
6. Le nombre et la nature des limitations politiques et sociales imposées aux échanges et à la consommation de la marchandise.
Nous pouvons continuer, sur la même voie que celle qui nous a permis de considérer le degré de capacité déchange des marchandises sur des marchés particuliers et à des moments particuliers, en nous intéressant aux limites spatiales et temporelles de leur capacité déchange. Sur cet aspect aussi, nous observons sur nos marchés des marchandises pour lesquelles la capacité déchange est quasi illimitée, dans le temps comme dans lespace, et dautres pour lesquelles cette capacité est plus ou moins limitée.
Les limites spatiales de la capacité déchange des marchandises sont principalement conditionnées :
1. par le degré de distortion du désir de ces marchandises dans lespace.
2. par la manière dont ces biens se prêtent au transport, et le coût du transport encouru par rapport à leur valeur.
3. par létendue par laquelle les moyens de transport du commerce sont développés pour chaque type de marchandises.
4. par le prolongement local des marchés organisés et leur Interconnexion par " larbitrage "
5. par les différences de restriction imposées au commerce, et singulièrement au commerce international.
Les limites temporelles à la capacité déchange des marchandises sont principalement conditionnées :
1. par la permanence du besoin de ces biens (leur indépendance aux fluctuations)
2. par leur durabilité, cest-à-dire leur propriété de préservation
3. par le coût de conservation et de stockage
4. par le taux dintérêt
5. par la périodicité du marché du même bien
6. par le développement de la spéculation et en particulier des arbitrages temporels
7. par les restrictions imposées, politiquement et socialement, et appliquées dune période à lautre.
Toutes ces circonstances, desquelles dépendent les différents degrés et les différentes limites temporelles et spatiales de la capacité déchange, expliquent pourquoi certaines marchandises sont à portée de main sur des marchés définis (comportant des limites spatiales et temporelles), à tout moment et à pratiquement nimporte quelle quantité, à des prix conformes à la situation économique générale, cependant que la capacité déchange dautres marchandises est confinée dans des limites spatiales et temporelles étroites ; et encore, même dans ces marchés restreints il est difficile de se séparer de ces marchandises en question, et ceci nest souvent possible que grâce à une diminution plus ou moins sensible du prix.
VI. La genèse du moyen déchange
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Pendant longtemps, le sujet universel au centre des discussions sur léchange, a été le fait que pour certaines marchandises il existait une plus grande, plus constante, et plus effective demande que pour dautres marchandises moins désirables, dans la mesure où les propriétaires peuvent et veulent échanger, ce qui est un but immédiatement universel mais, du fait de la relative rareté de ces biens, ce qui est toujours satisfait imparfaitement.
De plus, la personne qui veut acquérir certains biens définis en échange des siens est dans une position plus favorable sil apporte des marchandises équivalentes sur ce type de marché que sil visite les marchés avec des biens qui ne lui procurent pas de tels avantages, ou au moins pas au même degré. Ainsi équipé il a lespoir dobtenir des biens conformes à ceux quil voulait obtenir, non seulement avec plus de facilité et de sécurité, mais aussi, à cause dune demande pour ses biens plus solide et plus répandue, aux prix correspondants à la situation économique générale les prix économiques. Dans de telles circonstances, lorsque chacun apporte des biens difficilement échangeables sur le marché, il a comme idée fondamentale de les échanger, non seulement contre ce dont il a besoin, si un tel échange ne peut être effectué directement, mais aussi contre dautres biens, qui, même sil ne les veut pas pour lui-même, sont néanmoins plus échangeables que les siens.Par cet acte il natteint certainement pas de suite le but final de son échange, qui est lacquisition de biens qui lui sont utiles sinon indispensables. Pourtant il se rapproche de cet objectif. Par la voie tortueuse de léchange intermédiaire, il permet laccomplissement de son but plus sûrement et plus économiquement que sil sétait limité à un échange direct. De fait, il semble que cela a été le cas partout. Par lamélioration de la connaissance de leurs intérêts individuels, ainsi que de leurs intérêts économiques, les hommes ont été amenés, sans convention ni loi, sans même une quelconque considération de lintérêt commun, à échanger des biens destinés à léchange (leurs " articles ") contre dautres biens également destinés à léchange, mais plus échangeables et vendables.
Avec lextension des échanges dans lespace et avec les intervalles de temps allongées dattente de la satisfaction des besoins matériels, chaque individu apprend, par ses propres intérêts économiques, à faire très attention à échanger ses biens les moins vendables contre ces marchandises spéciales qui ont, nonobstant leur caractère échangeable dans un lieu particulier, un large pouvoir déchange dans le temps et dans lespace.
Ces articles sont déterminés par leur cherté, leur portabilité aisée, et leur capacité de conservation (dans la mesure où ils correspondent à une demande solide et répandue), assurant à son propriétaire un pouvoir, pas seulement ici et maintenant mais quasi illimité dans le temps et dans lespace, y compris sur les autres marchés de biens aux prix économiques.
Ceci se produit, à mesure que lhomme est versé aux avantages économiques, essentiellement grâce à un discernement devenu traditionnel et instinctif, et grâce à lhabitude de laction économique ; ainsi ces marchandises, les plus échangeables dans le temps et dans lespace, sont devenues sur chaque marché des articles, que chacun accepte déchanger contre ses biens les moins échangeables, mais aussi contre ceux auxquels il accorde le plus de valeur. Et leur capacité déchange supérieure dépend seulement de la capacité déchange relativement inférieure de chaque autre type de marchandise, et cest seulement ainsi quils sont devenus des moyens déchange acceptés par tous.
Il est évident que la genèse de tels moyens pratiques généraux déchange est très significative. Cette logique réside dans lintérêt économique qua chaque individu à échanger les marchandises les moins vendables contre les plus vendables. Mais lacceptation volontaire de ce moyen déchange présuppose déjà une connaissance de cet intérêt de la part des agents qui sattendent à