Pascal Salin vient de publier un traité sur le libéralisme qui devrait exercer une profonde influence sur les jeunes libéraux européens, ainsi que sur les réalités politiques en France et en Europe. Ce livre est le résultat d'une réflexion mûre non seulement sur les fondements de la liberté individuelle en société, mais aussi sur le rôle de l'Etat et sur les manières diverses et surprenantes dont la liberté se montre capable de résoudre les conflits sociaux qui bouleversent notre temps. En un mot, Libéralisme est la plus importante exposition et affirmation de la doctrine libérale sur le continent européen depuis la parution en 1927 de Liberalismus de Ludwig von Mises.
Avant d'évoquer le contenu de cet ouvrage il convient de souligner que Pascal Salin allie deux talents rares chez un professeur d'économie : il a une plume légère et un esprit clair. Dans les 500 pages de Libéralisme, le lecteur aura peut-être des points de désaccord avec lui, mais il ne trouvera guère de notions obscures ou contradictoires. Comme dans ses livres antérieurs (La concurrence ou La vérité sur la monnaie), Pascal Salin se situe dans la meilleure des traditions scientifiques en disant aisément ce que qu'il conçoit clairement.
Pascal Salin explique le libéralisme moderne en le distinguant de deux visions erronées particulièrement répandues aujourd'hui.
Pour ses ennemis, il s'agit d'une idéologie rationalisatrice qui justifie l'enrichissement d'une minorité de gens avides et égoïstes, que l'on nomme capitalistes, aux dépens des autres membres de la société et de l'environnement naturel. Pour les militants de la Gauche, le libéralisme contemporain est un anachronisme qui défend les intérêts d'une classe sociologique appartenant à un passé lointain. Il fut l'idéologie de la bourgeoisie du XIXème siècle qui seule profitait du laissez faire déchaîné. Mais depuis lors, les lumières politiques et l'humanité entière ont fait un grand saut en avant. Et même si le nouveau savoir-faire en matière d'organisation de la société n'a pas toujours été sagement appliqué, ce n'est pas une raison de retomber dans les pratiques inhumaines d'un capitalisme sans entraves. Par exemple, ceux qui, au cours de l'automne 1999, ont manifesté à Seattle et ailleurs leur opposition à l'Organisation Mondiale du Commerce, dénoncent dans celle-ci l'incarnation du " néolibéralisme ".
Il ne faut pas une grande connaissance de la doctrine libérale pour savoir que cette vue est profondément erronée. Le fait vraiment étonnant est que même ceux qui se désignent aujourd'hui comme des libéraux connaissent souvent très mal la doctrine libérale moderne - en tant qu'état actuel des connaissances sur les fondements et sur le rôle de la liberté dans la vie humaine.
Dans leur grande majorité, les libéraux contemporains adhèrent en effet à un libéralisme à la John Stuart Mill. Pour ce célèbre auteur du XIXème siècle, doté d'une pensée plutôt molle et fort peu systématique, la doctrine libérale se résumait à l'affirmation des droits politiques individuels, de la démocratie politique et de l'économie du marché dans un cadre juridique établi par l'Etat. Pas étonnant donc que les disciples contemporains de ce libéralisme « à la Mill » aient cru qu'il suffisait de préconiser l'établissement de réformes démocratiques dans les anciens pays communistes pour y implanter les préceptes fondamentaux du libéralisme et y restaurer liberté et prospérité.
Même les intellectuels universitaires sont mal informés sur les filières de l'héritage libéral qui ne descendent ni de Mill ni de ses adeptes. Ils connaissent rarement les énormes progrès intellectuels réalisés au cours de la seconde moitié du XXème siècle et qui ont fait du libéralisme ce qu'il est à l'heure actuelle : d'un côté, une description scientifique de la nature des rapports politiques susceptibles d'exister entre les hommes ; de l'autre, un programme d'action visant à supprimer l'Etat et à établir une Société Libre - c'est-à-dire, une société basée sur la propriété privée et réglée exclusivement par des rapports volontaires.
Ce libéralisme moderne est à maints égards bien différent de la doctrine du XIXème siècle toujours enseignée dans les facultés de sciences politiques sous le nom de libéralisme. Il s'inspire principalement des travaux de quatre auteurs : les économistes Ludwig von Mises, F.A. von Hayek, Murray Rothbard et la philosophe et romancière Ayn Rand.
Ce n'est pas le moindre mérite de Pascal Salin que d'apporter une nouvelle synthèse des idées de ces auteurs. Mais le professeur de l'Université Paris Dauphine renoue aussi avec la tradition des économistes français du XIXème siècle, dont le représentant le plus important fut Frédéric Bastiat. Pour ces économistes, l'efficacité économique n'était qu'un aspect secondaire de la liberté. La vraie base de la liberté individuelle en société, vient des aspects profondément éthiques et humanistes de la trinité libérale : liberté individuelle, propriété privée et responsabilité. Mais Pascal Salin n'est pas un simple adepte de ces précurseurs libéraux : sa vue synthétique sur le libéralisme aussi bien que, par exemple, son exposition de la nature de l'entreprise et du rôle de l'entrepreneur, sont tout à fait originales.
Dans les deux premières parties de Libéralisme il explique que cette doctrine repose sur une description réaliste de la nature de l'homme (et non pas sur un raisonnement seulement utilitariste etc.). Il l'applique ensuite à toute une série de problèmes d'actualité.
Libéralisme et démocratie
Pascal Salin dénonce la confusion souvent entretenue entre libéralisme et démocratie en soulignant, à la manière de Wilhelm von Humboldt, la distinction fondamentale qui existe entre le problème de la sphère légitime de l'Etat et celui de la forme de l'Etat. Loin d'être garante de la liberté, la démocratie est particulièrement problématique en ce qu'elle diminue la vigilance des citoyens à l'égard de l'Etat. Elle " endort les défenseurs des droits. "
" Nous devons nous débarrasser du préjugé habituel et dominant selon lequel le degré de démocratie est le critère unique pour évaluer le fonctionnement d'une société ou même d'une organisation quelconque. Le problème de la démocratie concerne en effet uniquement l'organisation du " gouvernement ", dans la mesure où il existe … A la limite, si un Etat n'a strictement aucun pouvoir, il importe peu qu'il soit ou non démocratique. En fait, deux questions doivent être soigneusement distinguées : La première concerne les limites respectives de la sphère privée et de la sphère publique. De ce point de vue, on doit opposer une société de liberté à un système totalitaire, toutes sortes de degrés existant entre ces deux systèmes. La deuxième question concerne l'organisation de la sphère publique et d'elle seule : ceux qui détiennent le pouvoir sont-ils élus ou non ? " (p. 102)
En démocratie " tous peuvent espérer accéder au pouvoir (directement ou par l'intermédiaire de leurs représentants) et réussir ainsi à obtenir des transferts en leur faveur. Au lieu de chercher à limiter le pouvoir, on cherche à s'en emparer. " Par conséquent, " si le sentiment de la spoliation pouvait conduire à la révolution, l'environnement institutionnel de la démocratie ne pousse pas les citoyens à la révolte révolutionnaire contre l'impôt. La démocratie endort les défenseurs des droits. " (pp. 108f)
Les entreprises, les associations, et l'Etat
Nous avons déjà mentionné que les chapitres sur la nature de l'entreprise et de sa fonction dans la société nous semblent particulièrement bien réussis. On cherchera en vain dans la littérature économique une description aussi réaliste et captivante de l'entrepreneur. L'entrepreneur, nous explique Pascal Salin, découvre comment les projets apparemment disjoints et même contradictoires, d'une multitude d'individus peuvent être réconciliés dans une activité commune qui est à la fois productive et profitable. C'est l'entrepreneur qui met cette activité en place en créant des institutions appelées " entreprises ".
" Dans l'entreprise s'accomplit le même miracle que réalise tout échange : des hommes et des femmes dont les buts sont différents et même initialement incompatibles, se rencontrent et se mettent d'accord. Personne n'abdique ses propres buts dans l'entreprise. Les buts sont multiples, mais ils deviennent compatibles par l'accord contractuel entre des personnes libres qui s'approprient des ressources, fruits de leur activité. C'est pourquoi il est erroné de dire que le but de l'entreprise est le profit et de critiquer le capitalisme pour le prétendu caractère matérialiste de son activité, la prédominance qu'il donnerait à l'argent et à la recherche du profit au dépens de toute valeur humaine. … Il est parfaitement légitime que le salarié n'ait pas pour objectif la maximisation du profit de l'entreprise, mais la maximisation de son salaire, son propre accomplissement dans les tâches qu'il doit effectuer ou la chaleur des relations humaines. Il se trouve simplement que, grâce au contrat de travail qui est l'un des éléments constitutifs de l'entreprise, ces objectifs peuvent être rendus compatibles avec ceux du propriétaire de l'entreprise qui poursuit peut-être la maximisation de son profit, ou de son prestige, ou tout autre objectif que nous ne pouvons pas connaître : la personnalité de chaque être humain est incommunicable et nous n'avons d'ailleurs pas le droit de nous mettre à la place d'autrui et de préjuger de la valeur de ses actes et de ses intentions. Mais ce sera le rôle spécifique de l'entrepreneur, en tant que titulaire des revenus résiduels, de concevoir tous ces contrats qui rendront compatibles les objectifs si variés de tous les partenaires. " (pp. 138f)
Il conclut : " C'est précisément parce qu'on a méconnu le caractère fondamentalement juste du fonctionnement de l'entreprise capitaliste que les économies centralisées ont échoué, à la fois sur le plan moral et sur le plan pratique. " (p. 140)
Les entreprises sont donc des formes d'intégration par excellence. Dans une société libre elles agiront côte à côte avec les associations qui, elles, n'ont pas d'objectif pécuniaire. Mais, les interventions diverses de l'Etat - en particulier la fiscalité - augmentent le poids relatif des associations au détriment des entreprises, et elles font des associations des branches de l'Etat :
" … l'interventionnisme étatique a suscité la création de pseudo-associations qui jouent un rôle tout à fait différent et contestable. Ainsi les excès de la fiscalité qui pèse sur le capital et sur les bénéfices ont souvent conduit à faire exercer par des associations des activités qui devraient normalement être assurées par des entreprises. Ceci est particulièrement vrai dans les domaines de l'éducation et de l'art. "
" L'idée courante selon laquelle les associations constitueraient des " pouvoirs compensateurs " est donc fausse dans les circonstances du monde d'aujourd'hui : loin de contrebalancer les pouvoirs de l'Etat, ces groupes les accroissent et s'en nourrissent, ils vivent en symbiose avec l'Etat. " (p. 146)
L'Etat et l'immigration
Sur le sujet de l'immigration qui à l'heure actuelle divise particulièrement les sociétés occidentales, Pascal Salin non seulement présente l'approche libérale de ce problème, mais il explique aussi qu'il existe un lien intime entre le racisme et son envers, l'anti-racisme militant. En effet, c'est l'intervention de l'Etat dans les problèmes d'immigration qui crée et renforce les antagonismes entre les " tenants de la préférence nationale et les chantres de la lutte contre le racisme ". Loin d'être un modérateur entre des groupes qui se haïssent, l'Etat est la source de leur opposition et de leur haine :
" L'unique solution, conforme aux principes d'une société libre, consisterait évidemment à reconnaître la liberté d'immigration, à supprimer les encouragements indirects à l'immigration que provoque la " politique sociale " et à rendre aux individus la liberté de leurs sentiments et de leurs actes. " (p. 242)
" L'étatisation du territoire a … une double conséquence : non seulement elle crée une incitation à immigrer qui, sinon, n'existerait pas, mais cette incitation joue uniquement pour les moins productifs, ceux qui reçoivent plus qu'ils ne fournissent, alors qu'elle décourage les immigrants productifs, ceux qui paieraient plus d'impôts qu'ils ne recevraient en biens publics. Comme toute politique publique elle crée donc un effet-boomerang. En effet, elle fait naître des sentiments de frustration de la part de ceux qui supportent les transferts au profit des immigrés et elle est donc à l'origine de réactions de rejet : le racisme vient de ce que l'Etat impose aux citoyens non pas les étrangers qu'ils voudraient, mais ceux qui obtiennent arbitrairement le droit de vivre à leurs dépens. " (pp. 236f)
" … aucun compromis ne pourra jamais être trouvé entre les tenants de la préférence nationale et les chantres de la lutte contre le racisme. Seul en est enrichi le fonds de commerce des politiciens et des animateurs de télévision populaires qui trouvent ainsi matière à d'inépuisables débats. " (p. 238)
" Instaurer une totale liberté d'immigrer dans le contexte actuel ne serait évidemment pas viable ni désirable. Ceci reviendrait par exemple à attribuer à tout individu dans le monde le droit non pas de contracter avec des français, mais le droit de vivre à leurs dépens, ce qui n'est pas du tout la même chose. " (p. 246)
La destruction de l'environnement naturel
A l'exception de l'immigration, aucun sujet ne fournit de nos jours un meilleur prétexte aux interventions de l'Etat que la prétendue nécessité de protéger l'environnement contre les ravages de l'égoïsme individuel. Aux yeux des avocats de l'environnement, l'Etat doit empêcher la destruction des forêts tropicales, il doit empêcher la production de CFC pour protéger la couche d'ozone, il doit forcer les citoyens à trier leurs ordures pour faciliter le recyclage etc. Pascal Salin démolit le noyau dur de ce catéchisme vert :
" … il est constant de dénoncer la destruction des forêts tropicales par les grandes sociétés multinationales, symboles d'un capitalisme apatride et destructeur. … Dans la description de ce carnage, on oublie cependant de préciser une chose ; à savoir que ces grandes sociétés ne sont pas propriétaires de la forêt, mais qu'elles bénéficient seulement d'une concession accordée par le véritable propriétaire, l'Etat. " (p. 386)
" … la forêt a progresser là où elle est majoritairement privée, par exemple en Europe ; elle a diminué là où elle fait l'objet d'une propriété étatique, par exemple en Afrique et en Asie. " (p. 387)
Pascal Salin fait montre d'une logique implacable quand il discute des possibilités dont devrait être doté tout individu pour attaquer en justice les producteurs des CFC qui, selon l'argument, des militants verts créent le célèbre trou dans la couche d'ozone : " s'il est facile de prouver le lien de causalité " émission de CFC - trou dans la couche d'ozone - atteintes à la santé ", le coût de l'acte juridique en est diminué d'autant pour le plaignant. Et si la causalité n'est pas facilement démontrable, pourquoi les gouvernements imposeraient-ils des taxes pour empêcher un phénomènes dont on n'a pas pu démontrer l'existence et/ou l'incidence ? " (p. 395)
Par un pareille éclat de logique et de bon sens, Pascal Salin propose à ses lecteurs de jeter leurs " poubelles vertes à la poubelle, refuser absolument de se transformer en trieur de poubelles. " Car s'il était vrai que le tri sélectif des déchets était une activité justifiée par rapport à d'autres activités humaines possibles, il y aurait de toute façon intérêt à le faire de la manière la plus économique possible. Comme dans toute autre activité, il serait en effet préférable de spécialiser des professionnels dans cette tâche et de la faire effectuer dans les lieux les mieux adaptés à cet égard. Ainsi, au lieu de transformer tous les citoyens en trieurs de poubelles et au lieu d'utiliser leurs rares appartements comme annexe de la vaste machine gouvernementale à trier les déchets, mieux vaudrait les laisser continuer à jeter tous leurs déchets dans des poubelles indifférenciées et faire assurer ultérieurement le tri par des spécialistes en des lieux éloignés des centres des grandes villes. " (p. 398)
Quel rôle pour l'Etat ?
Donc, pour Pascal Salin, ni l'immigration ni la protection de l'environnement ne sauraient justifier l'intervention de l'Etat. Il montre également qu'on n'a pas davantage besoin de l'Etat pour lutter contre le chômage, pour pratiquer une politique anti-cyclique, ou encore pour " sauver " le système monétaire etc.
Nulle part en effet on ne trouvera dans ce livre la moindre justification à l'existence de l'Etat. Pascal Salin ne se contente pas de souligner les capacités d'auto-régulation d'une société basée sur le respect de la propriété privée. Dans la tradition de Gutave de Molinari, d'Albert Nock et de Murray Rothbard, il ne voit tout simplement aucune raison à l'existence de l'Etat. L'Etat, écrit-il, n'a " aucune justification morale ni scientifique, mais … constitue le pur produit de l'émergence de la violence dans les sociétés humaines. " (p. 440). Loin d'être un élément constitutif de la vie en société, l'Etat est donc l'ennemi de la civilisation, et il doit être clairement reconnu en tant que tel :
" Pour un libéral authentique, c'est-à-dire non utilitariste, il n'y a pas de place pour l'Etat, puisqu' il représente l'émergence de la contrainte, c'est-à-dire la négation de la liberté. L'Etat est l'ennemi qu'il faut savoir nommer. Car il faut d'abord reconnaître ses ennemis avant de pouvoir les combattre. " (p. 70)
Une société sans règles est impossible. Mais quelle est la meilleure manière de produire les règles nécessaires aux fonctionnement de la société ? Est-ce qu'on ne trouve pas là la fonction fondamentale de l'Etat ? Salin rejette cette vision traditionnelle en embrassant le principe de base du libéralisme moderne :
" Nous avons donc la très ferme conviction que la production publique de règles sociales n'est pas nécessaire et qu'elle est même nuisible. Nous pensons qu'un marché sans règles publiques fonctionne mieux qu'un marché réglementé. Les exemples que nous avons étudiés dans le présent ouvrage, loin d'être exhaustifs, ont voulu en donner quelques illustrations. " (p. 496) " On ne connaît jamais à l'avance les meilleures solutions à un problème, il faut les découvrir lorsque les gens sont libres de décider. C'est pourquoi nous devons, sans aucune réticence, manifester notre opposition aux monopoles publics, nous devons savoir et proclamer que l'Etat est notre ennemi et nous ne devons pas hésiter à répéter sans relâche que l'Etat n'est pas un bon producteur de règles. " (p. 498)
Conclusion
A la fin de son livre Pascal Salin nous rappelle que, pour créer une société libre, il faut surtout avoir le courage de se plonger dans la bataille intellectuelle contre un environnement imprégné d'étatisme :
" On ne peut pas vouloir une chose et son contraire, on ne peut pas proclamer la liberté et accepter l'esclavage. Rechercher une troisième voie mythique entre le collectivisme et l'individualisme, se prétendre tolérant parce qu'on admet des compromis, ce n'est pas seulement un manque de lucidité, c'est un véritable trahison. Il faut du courage pour être libre, mais il faut aussi du courage pour être libéral dans ce monde de fausses valeurs, d'alibis douteux, de compromis idéologiques, de mimétisme intellectuel et de démagogie politicienne où l'humanisme libéral est ignoré, déformé, caricaturé jusqu'à la haine. " (p. 500)