Gustave de Molinari:Biographie
Gustave de Molinari | |
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1819-1912 | |
Auteur anarcho-capitaliste | |
Citations | |
« Ou le communisme vaut mieux que la liberté, et, dans ce cas, il faut organiser toutes les industries en commun. Ou la liberté est préférable au communisme, et, dans ce cas, il faut rendre libres toutes les industries encore organisées en commun. » « Le monopole d'un gouvernement ne saurait valoir mieux que celui d'une boutique d'épiceries. » | |
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Articles internes |
Le mariage des deux courants, le courant libéral classique de Mandeville, Say, Quesnay, Smith et Bastiat, et du courant de l'anarchisme individualiste de Godwin, Read, Stirner, Proudhon ou Thoreau, fut consommé par Gustave de Molinari, économiste français d'origine belge, qui fut le premier anarcho - capitaliste au sens contemporain. Gustave de Molinari croyait à une loi naturelle qui définit un droit individuel équivalent à la « souveraineté individuelle ». Dans une approche tout à fait lockéenne, il écrivait : " La souveraineté réside dans la propriété de l'individu sur sa personne et sur ses biens et dans la liberté d'en disposer, impliquant le droit de garantir lui-même sa propriété et sa liberté ou de les faire garantir par autrui... Si un individu ou une collection d'individus use de sa souveraineté pour fonder un établissement destiné à pourvoir à la satisfaction d'un besoin quelconque, il a le droit de l'exploiter et de le diriger suivant les impulsions de son intérêt, comme aussi de fixer à son gré le prix de ses produits et de ses services. C'est le droit souverain du producteur. Mais ce droit est limité naturellement par celui des autres individus non moins souverains, considérés en leur double qualité de producteurs et de consommateurs".
A cette théorie du droit, Molinari ajoute les conclusions des économistes libéraux classiques, qu'il pousse à la limite de leur logique. Tout ce qui est demandé peut être produit sur le marché. Dans Les soirées de la rue Saint-Lazarre, qui se présente comme un dialogue socratique entre un socialiste, un conservateur et un économiste c'est-à-dire un libéral, Molinari explique que, la propriété étant le fondement des « lois naturelles, immuables et absolues » qui gouvernent la société, la liberté du travail et la liberté contractuelle favorisent l'intérêt de tous, le libre-échange est efficace, « l'intervention du gouvernement dans la production est toujours nécessairement nuisible », même dans la production de la monnaie. Le domaine public et les routes pourraient être avantageusement privatisés : des entrepreneurs formeraient des compagnies immobilières pour construire des villes, des routes et les autres biens publics que les individus recherchent, et demanderaient un loyer aux clients qui s'y établiraient. La justice et l'efficacité du marché valent aussi pour la protection ou sécurité publique. Se présentant comme un « économiste radical », Molinari exposa d'abord cette thèse anarcho-capitaliste dans deux oeuvres parues en 1849, son ouvrage Les soirées de la rue Saint-Lazarre et son célèbre article "De la production de la sécurité" publié dans le Journal des Economistes : "ou le communisme vaut mieux que la liberté, et, dans ce cas, il faut organiser toutes les industries en commun, dans l'Etat ou dans la commune.
Ou la liberté est préférable au communisme, et, dans ce cas, il faut rendre libres toutes les industries encore organisées en commun, aussi bien la justice et la police que l'enseignement, les cultes, les transports, la fabrication des tabacs, etc."
Reconnaître au gouvernement un monopole de la production de la sécurité est incompatible avec le principe général des avantages de la libre concurrence. Le monopole étatique de la sécurité débouche souvent sur le communisme et toujours sur la terreur et la guerre. Il faut lutter pour « la liberté de gouvernement » en laissant le marché organiser et fournir la sécurité.
Contrairement à la société, un fait purement naturel, répondant aux besoins des hommes et à leur instinct de sociabilité, le gouvernement est une institution artificielle, dont l'objet est de "garantir à chacun la possession paisible de sa personne et de ses biens", de pourvoir au besoin de sécurité qu'engendrent la violence et la ruse de certains individus. Le gouvernement est donc nécessaire mais le principe économique des avantages de la libre concurrence s'y applique : le gouvernement même doit être concurrentiel, « la production de la sécurité doit, comme toute autre, être soumise à la loi de libre concurrence ». « Un seul gouvernement, explique-t-il, n'est pas plus nécessaire pour constituer l'unité d'un peuple, qu'une seule banque, un seul établissement d'éducation, un seul culte, un seul magasin d'épiceries, etc. » Les seuls autres principes qui puissent gouverner « l'industrie de la sécurité », et qui la gouvernent de nos jours, sont « ceux du monopole et du communisme ». Aucune raison ne justifie de faire du gouvernement, de l'industrie de la sécurité, une exception au principe que la libre concurrence est préférable au monopole et au communisme.
Les gouvernements, dit Molinari, ne savent pas mieux gouverner que les gens eux-mêmes. Il conçoit une société où, comme tous les autres biens et services, la sécurité serait librement échangée sur le marché. Pour prévenir ou réprimer les agressions contre lui, un individu achèterait des services de sécurité auprès du producteur ou assureur de son choix. « Chacun s'abonnerait à la compagnie qui lui inspirerait le plus de confiance et dont les conditions lui sembleraient les plus favorables », écrivait-il aussi dans Les soirées de la rue Saint-Lazarre. Un individu pourrait évidemment choisir de se protéger lui-même, mais les avantages de la division du travail joueraient là comme ailleurs. Les consommateurs jetteraient leur dévolu sur des fournisseurs offrant des conditions économiques intéressantes et aussi des « garanties morales » de justice. Chacun accepterait de se soumettre à sa compagnie de sécurité au cas où il se rendrait lui-même coupable de « sévices contre les personnes ou les propriétés », et tous accepteraient « certaines gênes » pour faciliter le travail de la justice.
Molinari croyait que des monopoles territoriaux apparaîtraient naturellement dans le marché de la sécurité. Mais ils ne mettraient en péril ni la justice ni l'efficacité puisque chaque producteur voudrait conserver la loyauté de sa clientèle devant les concurrents en puissance, qui n'attendraient qu'un signal d'insatisfaction des clients pour pénétrer dans le marché : « En cas d'une augmentation abusive du prix de la sécurité, [les consommateurs] auront, en effet, toujours la faculté de donner leur clientèle à un nouvel entrepreneur, ou à l'entrepreneur voisin. » Si, comme l'écrit Molinari, « la production de la sécurité doit, dans l'intérêt des consommateurs de cette denrée immatérielle, demeurer soumise à la loi de la libre concurrence », il résulte qu' « aucun gouvernement ne devrait avoir le droit d'empêcher un autre gouvernement de s'établir concurremment avec lui, ou d'obliger les consommateurs de sécurité de s'adresser exclusivement à lui pour cette denrée ». La concurrence entre les monopoles régionaux de facto détenus par diverses compagnies de sécurité dont aucune ne détiendrait de monopole de jure produirait la liberté de gouvernement.
La guerre et l'oppression disparaîtront avec l'organisation monopolistique qui les maintient : « De même que la guerre est la conséquence naturelle du monopole, la paix est la conséquence naturelle de la liberté. » L'autorité que les consommateurs délèguent à leurs producteurs de sécurité sera une « autorité acceptée et respectée au nom de l'utilité et non l'autorité imposée par la terreur ». « Nous sommes bien convaincus [...], écrivait Molinari en conclusion de son article de 1849, que des associations s'établiront un jour pour réclamer la liberté de gouvernement, comme il s'en est établi pour réclamer la liberté de commerce. »
Les libertariens d'aujourd'hui perpétuent cette union entre l'anarchisme et le capitalisme, quoique l'éventail des idées libertariennes embrasse un vaste courant dont l'anarcho-capitalisme n'est que la fine pointe.
Notes
Cf. P. Lemieux, L'anarcho-capitalisme, Que sais-je ?, 1988.
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