Le New Deal du Président Roosevelt a été salué avec enthousiasme, non seulement dans son propre pays, mais encore dans le monde entier. La raison de cette sympathie générale, c'est que l'idée essentielle du New Deal était exactement conforme à l'opinion publique. Tout le monde croyait qu'on avait besoin de remplacer le capitalisme et l'entreprise privée par un accroissement de l'intervention gouvernementale. Aussi, tout en critiquant certaines mesures isolées, fit-on un accueil favorable à l'ensemble de cette politique nouvelle.
C'est plus tard seulement que les économistes commencèrent prudemment à mettre en question, non seulement les éléments isolés, mais tout l'ensemble du système. L'essai de M. Baster, qu'on va lire, est à cet égard une contribution très remarquable et très importante. Malgré sa vive sympathie pour le but de la politique du Président, il expose sans passion et de façon fort pénétrante les problèmes politiques et économiques qu'elle implique.
Les partisans de l'interventionnisme et du planisme négligent généralement les questions économiques. Ils ne se rendent pas compte que le mécanisme du marché coordonne les activités des différents membres de la société, et que la plupart des défauts que l'on a coutume de reprocher au capitalisme sont l'effet d'une ingérence gouvernementale bien intentionnée, qui a manqué son but, et qui n'est parvenue qu'à gêner le fonctionnement harmonieux du marché. Aussi prétendent-ils porter remède aux conséquences néfastes de l'ingérence gouvernementale par l'accroissement de cette même ingérence. Les amis du planisme ne savent pas que le planisme partiel équivaut simplement à remplacer par des monopoles la concurrence entre les producteurs, et que le planisme total équivaut simplement à l'organisation communiste de l'économie.
Une autre chose que le public connaît mal, ce sont les conséquences politiques de l'interventionnisme et du planisme. La démocratie n'est pas compatible avec un système dans lequel toutes les activités économiques sont soumises au contrôle du gouvernement. Si notre époque est réellement le crépuscule du capitalisme, elle est aussi celui de la liberté et de la démocratie.
le premier devoir du citoyen, c'est de ne pas prononcer des jugements sur les questions essentielles de l'organisation économique de la société sans avoir acquis l'information nécessaire. A ceux qui la recherchent, on ne peut que recommander chaleureusement la lecture de ce livre.
Genève, mai 1937.