Différences entre les versions de « L'éthique, un drôle de truc ! »

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Comme je l'ai signalé, il y a des choses bonnes et d'autres mauvaises pour la santé : il faut savoir ce que nous devons manger, que le feu peut chauffer ou brûler selon les circonstances, que l'eau peut étancher notre soif et nous noyer. Pourtant, rien n'est simple : certaines drogues, par exemple, augmentent notre énergie ou produisent des sensations agréables mais leur abus continu peut être nocif. Elles sont bonnes ''par certains côtés'', mais mauvaises par d'autres : elles nous conviennent et en même temps ne nous conviennent pas. Dans le domaine des relations humaines, ces ambiguités sont encore plus fréquentes. Le mensonge est généralement mauvais car il discrédite le langage — dont nous avons tous besoin pour parler et vivre en société — et dresse les gens les uns contre les autres ; mais il peut être utile ou profitable de mentir pour obtenir un petit avantage. Ou pour accorder une faveur à quelqu'un. Exemple : vaut-il mieux dire la vérité sur son état à un malade atteint d'un cancer incurable, ou le tromper pour qu'il vive ses derniers instants sans angoisse ? Le mensonge ne nous convient pas, il est mauvais, mais il a parfois du bon. Nous avons déjà dit qu'il vaut mieux ne pas chercher la bagarre, mais tolérerons-nous qu'une fille soit violée sous nos yeux sans intervenir, simplement pour éviter de se battre ? Par ailleurs, le type qui dit toujours la vérité — quoi qu'il arrive — est mal vu ; et celui qui intervient dans le style Indiana Jones pour sauver la fille agressée a plus de chance de se retrouver la tête en compote que celui qui rentre tranquillement chez lui en sifflotant. En définitive, le mauvais peut paraître plus ou moins bon, et, dans certaines circonstances, le bon a toutes les apparences du mauvais. Un vrai sac d'embrouilles.
Comme je l'ai signalé, il y a des choses bonnes et d'autres mauvaises pour la santé : il faut savoir ce que nous devons manger, que le feu peut chauffer ou brûler selon les circonstances, que l'eau peut étancher notre soif et nous noyer. Pourtant, rien n'est simple : certaines drogues, par exemple, augmentent notre énergie ou produisent des sensations agréables mais leur abus continu peut être nocif. Elles sont bonnes ''par certains côtés'', mais mauvaises par d'autres : elles nous conviennent et en même temps ne nous conviennent pas. Dans le domaine des relations humaines, ces ambiguités sont encore plus fréquentes. Le mensonge est généralement mauvais car il discrédite le langage — dont nous avons tous besoin pour parler et vivre en société — et dresse les gens les uns contre les autres ; mais il peut être utile ou profitable de mentir pour obtenir un petit avantage. Ou pour accorder une faveur à quelqu'un. Exemple : vaut-il mieux dire la vérité sur son état à un malade atteint d'un cancer incurable, ou le tromper pour qu'il vive ses derniers instants sans angoisse ? Le mensonge ne nous convient pas, il est mauvais, mais il a parfois du bon. Nous avons déjà dit qu'il vaut mieux ne pas chercher la bagarre, mais tolérerons-nous qu'une fille soit violée sous nos yeux sans intervenir, simplement pour éviter de se battre ? Par ailleurs, le type qui dit toujours la vérité — quoi qu'il arrive — est mal vu ; et celui qui intervient dans le style Indiana Jones pour sauver la fille agressée a plus de chance de se retrouver la tête en compote que celui qui rentre tranquillement chez lui en sifflotant. En définitive, le mauvais peut paraître plus ou moins bon, et, dans certaines circonstances, le bon a toutes les apparences du mauvais. Un vrai sac d'embrouilles.


Il n'est pas si facile de vivre, car, dans ce domaine, les critères sur ce que nous devons faire peuvent être ''opposés''. En mathématique ou en géographie, il y a des savants et des ignorants, mais les savants sont presque toujours d'accord sur l'essentiel. Pour vivre, en revanche, les opinions sont loins d'être unanimes. Si nous voulons connaître des émotions fortes, nous pouvons choisir la formule 1 ou l'alpinisme ; mais si nous préférons la sécurité et la tranquillité, il vaut mieux aller chercher l'aventure au vidéoclub du coin. Selon l'un, rien n'est plus noble que de vivre pour les autres ; son voisin affirme que le plus utile est d'arriver à convaincre les autres de vivre au service d'un seul ; un troisième trouve que l'essentiel est de gagner de l'argent, un point c'est tout, et certains soutiennent que l'argent sans la santé ni les loisirs, sans affection sincère ni esprit serein, n'a aucun intérêt. Des médecins autorisés prétendent que la suppression du tabac et de l'alcool est un moyen sûr d'allonger la vie, à quoi les fumeurs et ivrognes répliquent que privés de tout il trouveraient évidemment la vie beaucoup plus longue. Etc.
Il n'est pas si facile de vivre, car, dans ce domaine, les critères sur ce que nous devons faire peuvent être ''opposés''. En mathématique ou en géographie, il y a des savants et des ignorants, mais les savants sont presque toujours d'accord sur l'essentiel. Pour vivre, en revanche, les opinions sont loins d'être unanimes. Si nous voulons connaître des émotions fortes, nous pouvons choisir la Formule 1 ou l'alpinisme ; mais si nous préférons la sécurité et la tranquillité, il vaut mieux aller chercher l'aventure au vidéoclub du coin. Selon l'un, rien n'est plus noble que de vivre pour les autres ; son voisin affirme que le plus utile est d'arriver à convaincre les autres de vivre au service d'un seul ; un troisième trouve que l'essentiel est de gagner de l'argent, un point c'est tout, et certains soutiennent que l'argent sans la santé ni les loisirs, sans affection sincère ni esprit serein, n'a aucun intérêt. Des médecins autorisés prétendent que la suppression du tabac et de l'alcool est un moyen sûr d'allonger la vie, à quoi les fumeurs et ivrognes répliquent que privés de tout il trouveraient évidemment la vie beaucoup plus longue. Etc.


A première vue, le seul point sur lequel nous sommes tous d'accord, c'est que nous ne sommes pas d'accord avec tout le monde. Mais tu remarqueras que ces opinions divergentes sont unanimes sur un autre point, à savoir que notre vie sera, au moins ''en partie'', le résultat de ce que chacun voudra en faire. Si notre vie avait un caractère entièrement déterminé, fatal, irrémédiable, toutes ces considérations n'auraient aucun sens. Personne ne se demande si les pierres doivent tomber vers le haut ou vers le bas : elles tombent vers le bas, et on y peut rien. Les castors font des barrages dans les torrents et les abeilles des rayons à cellule hexagonale : aucun castor n'est tenté de confectionner des cellules en cire, aucune abeille n'a jamais envisagé de se spécialiser dans l'hydrolique. Dans son milieu naturel, chaque animal parait discerner très bien ce qui est bon et mauvais pour lui, sans erreurs ni hésitations. Il n'y a pas d'animaux ''bons'' ni ''mauvais'' dans la nature, même si la mouche qualifie de ''mauvaise'' l'araignée qui tend son piège et la dévore. Mais l'araignée n'y peut rien...
A première vue, le seul point sur lequel nous sommes tous d'accord, c'est que nous ne sommes pas d'accord avec tout le monde. Mais tu remarqueras que ces opinions divergentes sont unanimes sur un autre point, à savoir que notre vie sera, au moins ''en partie'', le résultat de ce que chacun voudra en faire. Si notre vie avait un caractère entièrement déterminé, fatal, irrémédiable, toutes ces considérations n'auraient aucun sens. Personne ne se demande si les pierres doivent tomber vers le haut ou vers le bas : elles tombent vers le bas, et on y peut rien. Les castors font des barrages dans les torrents et les abeilles des rayons à cellule hexagonale : aucun castor n'est tenté de confectionner des cellules en cire, aucune abeille n'a jamais envisagé de se spécialiser dans l'hydrolique. Dans son milieu naturel, chaque animal parait discerner très bien ce qui est bon et mauvais pour lui, sans erreurs ni hésitations. Il n'y a pas d'animaux ''bons'' ni ''mauvais'' dans la nature, même si la mouche qualifie de ''mauvaise'' l'araignée qui tend son piège et la dévore. Mais l'araignée n'y peut rien...
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